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vendredi 27 septembre 2013

Dit moi comment tu voyages ?


 
Partout dans nos contrées, on a plutôt le cul vissé à la terre… A quelques exceptions prêtes, nos familles ne sont pas très voyageuses. Mais pourquoi donc? La tendance fut longtemps de s’ancrer au port, à prendre racine dans une terre fertile ou non. Les seuls voyages jamais entrepris s’appelaient exil ou déménagement, et comme on ne connaissait pas les vacances, prendre la route n’était souvent qu’une décision prise à la suite de gros ennuis, voir de fuite en avant, mais jamais une source de joie. Le nomadisme étant pour le coup considéré comme l’expression du désœuvrement, et de la pauvreté.

 

Ce que l’on ressent quand on voyage, que ce soit dans nos belles régions, ou plus loin à l’étranger, c’est justement, ce principe inhérent au voyage : celui d’être un étranger. Pour ma part, j’ai presque toujours expérimenté le voyage dans le bonheur, rencontrant un accueil amical partout où j’ai posé mes roues. Pourtant, il subsiste une certaine réticence dans nos campagnes, ou la population locale quelques parts au fin fond du pays basque (par exemple) a du mal à se lier avec les « touristes ».

C’est souvent autour de la table, que se « règle » certain différent. En goutant et en appréciant les spécialités locales.

Le sourire du serveur Espagnol en dit long, alors qu’au mois d’Août il vous sert un potage à midi, et que d’un coup vous êtes heureux de lui avoir fait confiance quand, quelques instants plus tard, vous comprenez qu’il s’agit d’une soupe froide… En France aussi, les découvertes peuvent être surprenantes,  je vous recommanderai entre autre choses de vous rendre en Alsace et de trouver une ferme auberge ici ou là, et de vous régalez d’un casse-croute Alsacien qui vous le verrez n’a rien à voir avec un sandwich SNCF…

Bien-sûr il arrive de temps à autre quelques déconvenues. Ou plutôt, parfois une assiette arrive sur la table et vous vous demandez ce qu’il peut bien y avoir dedans ? Je me remémore ici le jour où cette sympathique grand-mère Ecossaise nous a servi une assiette fumante de Haggis (pence de brebis farcie) au petit déjeuner… Et bien finalement nous l’avons apprécié, même aimé car il avait été préparé avec amour justement… Nous étions en voyage, et la chance nous était donné de découvrir… A propos de ces quelques désagréments, liés à la bouffe, ou toutes autres choses qui peuvent être déconcertantes en voyageant, j’aime cette phrase : « Celui qui veut voir l’arc-en-ciel doit apprendre à aimer la pluie. »

Ce que je sais quand je prends la décision d’entreprendre un voyage, c’est que je ne sais rien…

 

Donc autrefois, le voyage était mal vu… Et puis l’été 1936 est arrivé, les congés payés! Pour beaucoup de familles, (comme la mienne) les premiers voyages se sont fait à vélo, mon père me re-conta ses premières vacances à l’occasion de la communion de sa cousine à Renne, en tandem, plus de 300 km. Lui assis sur une selle que mon grand père avait fixée sur le cadre. Mes grands parents pédalant plus ou moins joyeusement pendant 10 heures et plus tout de même un peu assisté par  un moteur  à galet de marque  PP Roussey (sorte de solex)… Mon père avait 4 ans c’était en 1937…
 

 

Bien avant les premières voitures populaires, même si seulement 10% des français de l’époque ont réellement profités des deux semaines de congés payés d’alors. Pour partir en voyage, certains avaient bien entendu pris le train, d’autre leur bicyclette qui représentait un véritable objet de richesse ! En effet, celui qui avait les moyens de se payer un vélo avait déjà pas mal économisé.

Enfin  il y avait une infime parti de cette population ouvrière qui a pris la route de vacances improbables aux commandes d’un véhicule au combien différent…

Celui-là même qui déjà était original car asymétrique dans un monde où tout est symétrique ou presque. Un monde où les choses doivent être concrètes.  Un véhicule né désuet là où la désuétude n’avait déjà que très peu de place… J’ai nommé le side-car ! Mais où est cette désuétude quand après initiation, on songe à découvrir ses prodigieuses « vertues »…

 

En ce temps là, il y avait en France une industrie moto importante, Terrot, Monet-Goyon,  De Dion-Bouton, Peugeot bien-sûr et tant d’autre… Comme il s’agissait pour bon nombre de motos utilitaires, donc bonnes à tout faire. Beaucoup de familles modestes ont attelés ses engins pour partir à l’aventure sur les routes de notre beau pays. Le problème venant souvent de la faible cylindrée de ces motos, et de leur manque évident de puissance. Certains motards un peu plus acharnés que les autres achetèrent les Harley-Davidson réformé par l’armée Américaine et laissée là après la guerre de 14.

Une 1000 Indian ou Harley-Davidson était finalement vendue à un prix relativement abordable, et surtout offrait un surcroit de chevaux plus qu’appréciable quand on vient à atteler. Ceci  comparé à une 350 Peugeot, Terrot ou New Map à soupapes latérales ou semi-culbutées, qui sans leurs faire offenses étaient bien en retrait.

Le « hic » concernant ces attelages « à l’américaine » venait surtout du fait qu’elles étaient aussi beaucoup plus gourmandes en pneumatiques et chaînes, mais surtout en huile et carburant, denrées beaucoup plus rares en France à l’époque. Surtout déjà beaucoup moins bon marché qu’outre Atlantique…

 

Andréa la vielle voisine aujourd’hui disparue m’a dit un jour : « Moi aussi je sais ce que s’est qu’un side-car ! » Ragaillardie sur le pas de sa porte, elle me vit débouler avec mon premier attelage au domicile familial. Autour d’un café, du haut de ses 90 printemps, elle m’a décrit. En vrai Titi Parigos qu’elle était ; Les aventures d’une mouflette au nez sale, au pays des side-caristes à papa ! Elle commença par me raconter que les ouvriers qualifiés, pour partie Parisiens, travaillant dans les usines de sidérurgie étaient suffisamment argentés pour se payer un side-car! « Tout le monde » partait direction la Baule avec le pique-nique dans la mal en osier pour les jours de congés, et les grands Week-end…

Elle-même emmitouflée dans une couverture avait fait bien du chemin assise sur les genoux de sa mère à bord du Bufflier « sport » attelé à une 750 Saroléa venu de Belgique.

Je lui promis de lui faire faire un petit tour à bord de notre Corsaire, malheureusement, je n’en ai pas eu l’occasion, après une dernière cabriole, Andréa se cassa le col du fémur, et fini ses jours dans une maison de repos sans que je puisse réaliser ma promesse.

Ainsi Andréa se souvenait très bien que les copains de son père, juste avant guerre disaient : Le side-car qu’il fallait avoir à l’époque était la 750 Gnôme et Rhône avec un side-car Bernardet « Avion ». Du haut de ses 30 chevaux avec une boite 4 vitesses, ce magnifique attelage était capable de propulser une petite famille toute entière à une vitesse de croisière proche des 110 km/h…

 

 
Bien-sûr plus tard la 2 CV Citroën est arrivée, suivie par la 4L Renault, entraînant avec elles une ribambelle de voitures économiques qui tuèrent l’industrie moto française, et par la même occasion les side-cars de grand papa… Il fallut attendre les années 70 pour voir ressortir ces curieux engins sur nos routes, mais ça, c’est une autre histoire…

 

De nos jours les voyages en side-car, comme à l’époque coûte chère, ce n’est pas la crise de 1929, mais une autre qui entrave encore les aventuriers en herbe que nous sommes. Eternelle recommencement de l’histoire ? En tout cas il m’est doux et bon de savoir que nous résistons à la morosité ambiante en faisant des projets de voyages. Qu’ils soient au long court, ou de simples balades dominicales, le temps d’un déjeuné sur l’herbe. Peu m’importe ! Ces voyages sont pour moi l’expression de la liberté. La soif de découverte de nouveaux paysages, de nouveaux sourires rencontrés en passant sont des trésors que j’aime à recevoir…

 

 

                                                                                                Phil.

 

 

 

A Andréa et ses belles histoires.

Et a mon père qui m’a donné son goût pour les voyages…

 


Wallace Monument Ecosse




Bernardet-Peugeot 515



mono Sunbeam




Au pieds du Mont Blanc



prêt à rouler!





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